Table ronde – Occitan gascon et basque : regards croisés

Une réflexion linguistique et patrimoniale sur les relations entre basque et gascon, proposée à Guiche le samedi 29 novembre 2025, à partir de 15 heures à la salle des fêtes.

Cette intervention s’inscrit dans le programme complet de l’après-midi Basque, gascon et patrimoine.

Extrait de la carte des dialectes de Bonaparte (1863) – © Bilketa

Le voisinage entre langue occitane et langue basque est un phénomène linguistique d’un grand intérêt qui dépasse celui d’une simple confrontation.

En effet, l’occitan dans sa variété gasconne manifeste une grande originalité dans l’ensemble occitan sur un vaste territoire situé à l’ouest de la Garonne, qui est un des rares fleuves constituant une frontière linguistique, tout au moins sur la majorité de son cours : l’Aquitaine antique, de l’estuaire de la Gironde aux Pyrénées était déjà manifestement originale, comme non celte, pour Jules César. Certains des traits qui caractériseront ensuite le gascon sont attestés dès le VIIᵉ siècle. Les conférenciers rappelleront ces traits particuliers et le fait qu’ils existent aussi pour une bonne part en basque.

Ceci n’empêche pas que le basque, qui n’est pas une langue romane comme l’occitan, présente, y compris par rapport à la variante gasconne de cette langue, une typologie fort différente sous de nombreux aspects.

De plus, au sein même du gascon et du basque, on constate une grande variation selon les espaces et on songe par exemple au gascon noir qui se distingue phonétiquement par le célèbre exemple : La pelha de la hemna qu’es nega [lə’pœʎəðələ’hœmnəkəh’nœɣə] dans lesquels tous les e accentués sont labialisés et ainsi prononcés comme « eu » ([œ]/[ə]) à la différence du é du gascon clair. En basque, on peut exprimer : « dimanche prochain je serai en montagne » aussi bien par daigün igantin borthin nükek (en Soule) que par datorren domekan mendixen egongo nok (en Biscaye) ce qui dit assez la différenciation, que le basque standard récent atténue.

Un rapide rappel historique sera fait sur les ressemblances et oppositions entre les langues. D’une part, la présence d’une langue bascoïde en Aquitaine, attestée par bon nombre d’inscriptions, a-t-elle été un des facteurs qui ont contribué à la particularisation du gascon dans le bloc roman et par rapport à l’ensemble d’oc ? D’autre part, au fil du temps, le contact basco-gascon n’a-t-il pas favorisé la formation d’éléments communs entre les deux langues, ou du moins d’emprunt ? Bien des spécialistes ont creusé et tenté de résoudre ces questions complexes.

Le contact et voisinage séculaire des deux langues, basque et occitan sous sa version gasconne, a laissé bon nombre de traces qui seront évoquées. Le gascon a pu développer une scripta administrative, de fait officielle, y compris en domaine basque et des populations gasconnes vivaient par exemple à Saint-Sébastien. Les Sharnègos, locuteurs qui savent parler aussi bien le gascon que le basque, témoignent d’un contact des langues bien enraciné.

Des cartes et documents visuels illustreront ces domaines ainsi que la comparaison de divers termes dans le vocabulaire des deux langues, termes connus encore par les locuteurs actuels. L’accent sera mis par exemple sur quelques noms de poissons comme l’alose (colac, aston), le muge ou mulet (corcon/cricon, korrokoin), le chevesne (cabòç) etc.

On pense à bien d’autres mots communs comme talòs (gros ver) ; bernat pudent, krapaut et sapo, apèu, dalhòt, tardaña, miñatera, galerna, arrankura, biro, cohau, vime, bertseia et vrespèr, agòr/gòrra, etc.

Les conférenciers, Alain Viaut et Xarles Videgain, médoquin et bayonnais, sont membres du centre de recherches IKER CNRS Bayonne.